Les remous de la Révolution de 1789, en France, accentuent les besoins urgents et généralisés de catéchèse et d'éducation chrétienne dans les campagnes.
Un jeune vicaire de 28 ans, fraîchement arrivé dans sa paroisse rurale de La Valla (Loire) au sud-est de Lyon, entreprend une action pour y faire face.
Il invite deux jeunes gens de bonne volonté et déjà résolus, à vivre en communauté et à se préparer à leur future mission, en gagnant leur pain par un travail artisanal. C'était le 2 Janvier 1817 ; l'abbé Marcellin Champagnat fondait ainsi très modestement l'Institut religieux laïque des « Petits Frères de Marie ».
La devise de son Institut est :
« Tout à Jésus par Marie. Tout à Marie pour Jésus »
Sa spiritualité : La disponibilité mariale, et le sens de l'Église.
Son esprit : La simplicité évangélique, et l'entente fraternelle.
Sa mission : Le zèle apostolique, l'éducation des jeunes, et l'attention aux moins favorisés.
Le Père Marcellin Champagnat a consacré toutes ses forces, jusqu'à ses 51 ans (20 mai 1789–06 juin 1840), à la culture spirituelle, religieuse et pédagogique de ses Frères, et au développement de l'Institut.
Il a été canonisé à Rome par le pape Jean-Paul II, le 18 avril 1999.
En 1863, le Saint-Siège a approuvé l'Institut et l'a inscrit officiellement sous le nom de « Frères Maristes des Écoles ».
L'authenticité et la bienveillance par lesquelles les Frères Maristes veulent caractériser leurs relations, entre eux et à l'égard de tous, s'enracinent dans les trois vertus mariales d'humilité, de simplicité et de modestie. Celles-ci sont symboliquement évoquées par trois petites violettes.
PRÉSENCE MARISTE AU MOYEN-ORIENT
En fondant son Institut, le Père Marcellin Champagnat lui a donné une portée missionnaire et apostolique. Il disait à ses Frères : « Tous les diocèses du monde entrent dans nos vues. » C'est pourquoi il n'a pas hésité, ainsi que ses successeurs, à répondre aux demandes sollicitées par les différentes congrégations et par plusieurs autorités ecclésiales à travers le monde entier. En effet, à trois reprises et à peu de distance d'intervalle, vont se succéder des Frères permettant ainsi d'agir en faveur de l'apostolat au Proche-Orient :
1re implantation : de 1868 à 1875, durant l'occupation ottomane.
2e implantation : de 1895 à 1914, sous l'occupation ottomane également.
3e implantation : de 1919 à nos jours.
Particularités de cette présence
Les Frères Maristes, au Moyen-Orient, ont d'abord travaillé comme membres du corps professoral dans des séminaires et des collèges tenus par des congrégations de prêtres (Jésuites, Lazaristes, Capucins, Carmes, Pères de Sion, Franciscains), ou appartenant à des Patriarcats catholiques de rites orientaux (Maronite, Arménien-Catholique, Grec-Catholique), dans les pays suivants :
-Au Liban (1868-1875, puis à partir de 1895).
-En Égypte(1898), en Turquie(1900), en Irak(1902), en Palestine(1904), et en Syrie(1904).
D'autre part, les communautés maristes ont également exercé leur mission éducative dans des établissements loués ou gracieusement prêtés par des particuliers, des organismes officiels, des évêchés et des congrégations religieuses.
Parallèlement, quelques maisons et écoles ont été directement fondées par les Frères, devenant ainsi la propriété de l'Institut.
1re implantation
En 1868, cinq Frères d'abord, et trois autres l'année suivante, furent envoyés pour aider les Pères Jésuites au séminaire-collège de Ghazir (Caza du Kesrouan) et à leur collège de Beyrouth.
Mais, au bout de sept ans, une pénurie de sujets, liée en partie aux séquelles de la guerre franco-allemande de 1870-1871, entraîna leur retrait en 1875.
Les circonstances devinrent plus favorables vingt ans plus tard.
2e implantation
En 1895, des Frères furent envoyés au Liban : cinq chez les Pères Lazaristes à Antoura (Caza du Kesrouan), et l'année d'après cinq autres chez les Pères Jésuites à Beyrouth. Chaque année, trois, quatre, ou cinq Frères arrivaient.
En 1898, les Frères prennent en charge une école primaire dans des locaux appartenant à des particuliers, à Jounieh (Caza du Kesrouan).
En 1900, ils sont chargés, des écoles à Amchit (Caza de Jbeil), Achkout (Caza du Kesrouan), et à Baabdath (Caza du Metn).
En 1903, quelques Frères sont sollicités, soit pour :
-collaborer au séminaire patriarcal des Maronites à Kfarhay (Caza de Batroun), et au séminaire Arménien-catholique à Bzommar (Caza de Kesrouan) ;
-diriger des écoles à Michmich (Caza de Jbeil), et à Baskinta (Caza du Metn) ;
-inaugurer leur nouveau « Collège du Sacré-Cœur » à Jounieh, de même que leur future maison provinciale, « Notre Dame du Liban », à Amchit (1898-1900), construction terminée à temps pour recevoir déjà un groupe de jeunes Frères exilés. C'est ainsi que vingt jeunes Frères, dix novices, six postulants, et sept juvénistes viennent au Liban avec leur maître de formation. Les jeunes continuent leurs études à Amchit ; d'autres jeunes, des Libanais, se joignent à eux.
En 1904, diverses Communautés demandent l'aide des Frères :<br>
-Les Pères de Sion, en Palestine.
-La Communauté Arménienne-Catholique, dans leur collège d'Alep, en Syrie.
-La Communauté Maronite, au séminaire patriarcal de Roumieh (Caza du Kesrouan).
-Les Pères Jésuites, à Bikfaya (Caza du Metn) et à Saïda (Caza de Saïda) dans leur école primaire. En 1908, ils les chargent du « Collège Saint-Louis », à Saïda ; ce collège leur sera ensuite vendu en 1924.
En outre, les Frères prennent la responsabilité de plusieurs écoles dans différentes régions : à Batroun, à Hadath, à Deir el-Kamar, à Beit-Chebab et à Zahlé.
En 1908, les Frères ouvrent leur école « Notre Dame de Lourdes » à Jbeil.
En 1911, deux Frères de la Province de Syrie vont fonder une école à Betafo, à Madagascar.
En 1914, Les Turcs chassent les étrangers et transforment les écoles en casernes. Les Frères syriens et libanais sont obligés de s'exiler en Italie, à Bairo, près de Turin.
3e implantation
En 1920, vingt Frères seulement ont pu revenir d'Europe. Ils choisissent de ne rouvrir que neuf écoles : en Syrie (Alep et Damas) et au Liban (Batroun, Amchit, Jbeil, Jounieh, Deir el-Kamar, Saïda et Zahlé). Des Frères vont arriver de nouveau, et des jeunes Syriens et Libanais entrent dans l'Institut.
En 1939, les Frères au Liban et en Syrie sont au nombre de 90. La Seconde Guerre mondiale les ramène à 40 ; c'est pourquoi les Frères ont dû se retirer définitivement de Batroun (1952) et de Deir el-Kamar (1954) et arrêter leur enseignement dans les collèges secondaires d'Alep et de Damas, nationalisées en 1967.
L'année 1961 a connu le transfert du « Collège Saint-Louis » de Saïda à Rmeyleh sous le nom de « Notre Dame de Fatima ». Ce collège a atteint les 2000 élèves, comprenant environ 50% de chrétiens et 50% de musulmans.
En 1973, des affrontements ont éclaté au Liban, et en 1975, s'est déclenchée une longue guerre, suivie par l'occupation militaire israélienne du Liban-Sud, en 1983 et 1984. Mais en mars 1985, et avec le retrait des Israéliens, beaucoup de chrétiens quittent cette région, et le collège de Rmeyleh est occupé par des miliciens qui le transforment en caserne jusqu'en 1994.
En 1966, le Collège du Sacré-Cœur de Jounieh est transféré à Dik el-Mehdi (Caza du Metn), sous le nom de « Champville » (Champagnat-ville).
Situation actuelle des Frères Maristes au Proche-Orient
Actuellement, les Frères Maristes, malgré leur nombre très réduit, continuent d'assurer leur mission spirituelle et éducative auprès de la jeunesse, aidés par des laïcs engagés.
- À Alep (Syrie), une Fraternité de trois Frères assure une présence mariste auprès de la population chrétienne (catéchèse, mouvements de jeunesse, animation liturgique).
- À Jbeil et Amchit (Liban), quatre Frères, aidés par des laïcs, veillent sur l'éducation spirituelle et humaine de quelque 1900 enfants et jeunes, de la Maternelle à la Terminale.
- À Champville (Dik el-Mehdi, Liban), six Frères, aidés aussi par des laïcs soucieux de prodiguer une bonne formation chrétienne et humaine auprès de la jeunesse libanaise, veillent à la réalisation du rêve du Saint Fondateur : « Former de bons chrétiens et de vertueux citoyens ». Cette formation est assurée à plus de 3140 élèves, des classes maternelles aux classes terminales.
- À Rmeyleh, le collège « Notre Dame de Fatima » a besoin d'une grande restauration avant de pouvoir rouvrir ses portes pour accueillir une jeunesse assoiffée d'une présence mariste très particulière.
- Le centre de Faraya, situé à une altitude de 1250 mètres, sous le nom de « Foyer Champagnat », accueille (été comme hiver) des groupes de jeunes ou d'adultes désireux de recevoir ou d'approfondir leurs formations humaine, chrétienne, culturelle, pédagogique et particulièrement mariste.
De 1868 à nos jours, un beau travail apostolique a été réalisé. Les archives du Secteur Proche-Orient Mariste conservent les fiches individuelles de plusieurs Frères qui ont œuvré au Proche-Orient. Leur action apostolique accomplie, ils ont passé à d'autres le flambeau de l'apostolat, leur laissant la tâche à accomplir, celle prévue par La Divine Providence.
Il est bon de mentionner aussi cette empreinte particulière dont sont marqués les élèves des Frères Maristes : simplicité, contact aisé, franchise, reconnaissance, goût du travail bien fait.
Avec leur cachet marial et leur esprit mariste, les Frères s'insèrent dans la mission éducative primordiale de l'Église au Proche-Orient. Ils invitent des jeunes gens à se joindre généreusement à eux, pour qu'en continuant l'œuvre du Père Champagnat, ils contribuent à développer une foi vivante dans la communauté des fidèles et à promouvoir une éducation chrétienne qui imprègne la vie et l'action des jeunes.
Ainsi préparés, ceux-ci pourront assurer leurs responsabilités dans une région fertile en références historiques et située à la rencontre des civilisations, pour réaliser une société de tolérance mutuelle et de coexistence dynamique.
Hicham Ragheb
Promo 1999